Aider les jeunes à garder l'équilibre
Comment prévenir les abus sexuels chez nos ados ?
Aider les jeunes à garder l'équilibre
Comment prévenir les abus sexuels chez nos ados ?
Auteure : Roxanne Guyon, doctorante en sexologie
Saviez-vous qu’au Québec, les deux tiers des victimes d’abus sexuels ont moins de 18 ans ? On estime aussi que dans près de 9 cas sur 10, les agressions sexuelles sont commises par une personne connue de la jeune victime.
Alors comment, en tant que parent, peut-on protéger son ado de la violence sexuelle mais aussi des comportements abusifs qu’il-elle pourrait commettre ? Voici quelques conseils pratiques et des ressources pour vous accompagner sur ce sujet sensible.
QUELS SONT LES ABUS SEXUELS AUXQUELS LES ADOS SONT LES PLUS EXPOSÉS ?
Les situations d’abus sexuels à l’adolescence peuvent principalement survenir dans un contexte familial, relationnel/intime ou d’autorité. Dans la plupart des cas, l’agresseur-e est une personne connue de la victime et même une personne de confiance (membre de la famille, partenaire intime/amoureux-se, ami.e, entraîneur-e sportif-ve, enseignant-e). Toutefois, on observe aussi chez les ados de plus en plus de situations d’abus sexuels lors d’événements festifs (party) ou en ligne (partage de photos/vidéos intimes).
Pour en savoir plus sur l’ampleur des violences sexuelles chez les jeunes 👉 visitez le site de l’INSPQ (l’Institut National de Santé Publique au Québec).
En savoir plus sur les différentes formes de violences sexuellesQUELLES SOLUTIONS POUR PRÉVENIR LES ABUS SEXUELS CHEZ VOTRE ADO ?
Avant même d’aborder la question des abus sexuels, vous pouvez sensibiliser et éduquer votre jeune à plusieurs notions de base de construction de soi au quotidien :
• Aidez votre ado à développer une saine estime de soi : une mauvaise estime peut être un facteur de vulnérabilité à subir un abus sexuel.
👉 Nos conseils pour aider votre ado à voir tout son potentiel
• Cultivez chaque jour votre relation avec votre ado et entretenez une bonne communication avec lui-elle : il est important que votre enfant sente qu’il-elle peut se confier à vous sans craindre d’être jugé-e. Il peut donc être bénéfique d’initier des conversations sur des sujets plus sensibles ou difficiles, d’être à l’écoute et de valider ses émotions lorsqu’il-elle s’ouvre à vous, de lui dire explicitement qu’il-elle pourra toujours compter sur vous si quelque chose se produit. Plus tôt une bonne communication est instaurée dans votre relation avec votre jeune, plus cela va faciliter les conversations sur des sujets sensibles, comme l’abus sexuel.
• Sensibilisez et éduquez votre ado au consentement sexuel, aux formes que peuvent prendre les abus sexuels et à l’importance d’en parler si une telle situation se produit.
👀 Écoutez cette vidéo pour savoir comment parler de consentement avec votre ado.
À QUEL ÂGE PEUT-ON COMMENCER À PARLER DE SEXUALITÉ AVEC SON ENFANT ?
Il est recommandé de faire de l’éducation à la sexualité dès le plus jeune âge avec son enfant (dès 2-3 ans, c’est possible !), et de le faire à plusieurs moments durant son développement, en adaptant bien sûr le discours à l’âge de l’enfant. Par exemple, chez les jeunes enfants, on peut les sensibiliser à l’effet que leur corps leur appartient, leur apprendre à nommer les parties intimes, à distinguer un bon d’un mauvais secret, à développer leur capacité à dire non lorsqu’ils-elles ne veulent pas faire quelque chose et en parler avec un adulte de confiance si cela arrive.
Ces conversations n’ont pas nécessairement besoin d’être faites de manière très formelle, vous pouvez par exemple, initier une discussion avec votre jeune suite à un passage dans un film, une chanson à la radio, un fait d’actualité, etc.
Sachez qu’il n’est jamais trop tard pour commencer à faire de l’éducation à la sexualité et parler de ces sujets avec votre jeune.
Découvrez Club Sexu : un média spécialisé dans la création de récits, de jeux et d’événements pour parler de sexualité de façon plus positive, ludique et inclusive.
COMMENT PRÉVENIR L’APPARITION DE COMPORTEMENTS ABUSIFS CHEZ SON ADO ?
L’importance de commencer à faire de l’éducation à la sexualité dès le plus jeune âge vaut aussi pour la prévention des comportements abusifs.
Voici quelques exemples de discours et d’attitudes à privilégier :
👩🏽🤝🧑🏿 Sensibilisez votre jeune au respect de soi et des autres, à l’empathie et à la bienveillance.
🥰 Parlez-lui de consentement et des bases d’une relation saine.
💥 Sensibilisez votre ado aux conséquences que ses actes pourraient avoir pour la victime et pour lui/elle-même s’il n’y avait pas de consentement, et nommez explicitement qu’il s’agit de violence sexuelle.
🚩Abordez explicitement certaines formes d’abus qui sont moins reconnues par les jeunes : mettre de la pression pour avoir une activité sexuelle, envoyer une photo de ses parties génitales sans avoir obtenu le consentement de l’autre, avoir une relation sexuelle avec une personne sous l’influence d’alcool ou de drogues…
🗨 Sensibilisez votre ado aux différentes façons dont se manifestent les violences dans un contexte de relation amoureuse en l’aidant par exemple à comprendre la différence entre conflit et violence.
👉Donnez-lui des outils concrets pour mieux gérer ses conflits.
🤔 Interrogez-vous sur votre propre comportement : la façon que vous avez de gérer certaines situations est un exemple pour votre ado qui pourrait répéter les mêmes comportements (c’est ce qu’on appelle l’éducation silencieuse).
👇 Pour plus de conseils pour vous aider à parler des violences dans les relations intimes avec votre jeune 👇
Écoutez les capsules vidéo du programme ÉtincellesL’environnement (social, culturel, familial) dans lequel l’ado grandit peut aussi jouer un rôle dans l’apparition de comportements problématiques.
Comme parent, vous avez un rôle privilégié pour minimiser les risques :
• En renversant les stéréotypes véhiculés dans la culture du viol, qui est supportée par des attitudes et des comportements sociaux qui minimisent, normalisent voire encouragent le viol. Elle se manifeste par exemple dans le fait de blâmer les victimes et de remettre en cause leur parole (en mettant la responsabilité sur ce qu’elles portaient durant les événements, en minimisant les faits, ou encore en reprochant de ne pas avoir dénoncé).
• En sensibilisant votre ado aux risques liés à sa consommation de pornographie et en l’amenant à devenir plus critique envers ce qui est mis de l’avant dans la pornographie (scènes ou il y a absence de consentement par exemple).
• En formant un entourage aimant et soutenant auprès de votre jeune et en lui offrant une bonne éducation à la sexualité. Le fait d’avoir des amis qui ont des valeurs ou comportements délinquants, ou d’être témoin de violence conjugale à la maison peuvent être des facteurs de risque à commettre des comportements abusifs mais la présence bienveillante et le soutien de l’entourage peut diminuer ce risque.
À noter que ce n’est pas parce qu’un-e ado vit dans une société où sont véhiculées ce genre d’attitudes ou qu’il-elle écoute de la pornographie, qu’il-elle va forcément commettre des abus sexuels. Mais la culture du viol contribue à véhiculer le message que ‘’ce n’est pas grave et de toute façon, il n’y aura pas vraiment de conséquences’’, ce qui peut encourager le passage à l’acte ou du moins, ne pas inciter les jeunes à se poser des questions sur leurs comportements sexuels et à prendre en considération les besoins et limites de leurs partenaires.
COMMENT REPÈRE-T-ON QUE SON ENFANT SUBIT OU A SUBI UN ABUS SEXUEL ?
Tous les ados ne réagiront pas de la même façon suite à un tel événement, il s’agit donc surtout d’observer un changement de comportement chez votre jeune (perte ou gain d’appétit, irritabilité ou agressivité excessive, symptômes d’anxiété ou de dépression plus prononcés, repli sur soi, début de consommation de drogues…). Ces changements peuvent être un indice que quelque chose ne va pas.
Mais ces symptômes ou comportements ne peuvent à eux seuls confirmer qu’il-elle a subi un abus sexuel. Son dévoilement reste le seul indice fiable. C’est pourquoi il est important d’ouvrir la discussion avec votre jeune.
POURQUOI IL PEUT ÊTRE TRÈS DIFFICILE POUR UN-E ADO DE PARLER DE SON AGRESSION ?
Dire à son parent que l’on a vécu un abus sexuel, ça peut être difficile pour plusieurs raisons :
• Ça peut être gênant de parler de sexualité avec son parent, et encore plus d’un sujet aussi délicat qu’un abus sexuel. Il se peut aussi que le parent ne soit pas au courant que son ado est actif-ve sexuellement ou qu’il-elle connait bien l’agresseur-e, ça peut donc créer des barrières supplémentaires au dévoilement.
• L’ado victime peut aussi avoir intériorisé le blâme que la culture du viol lui fait porter (croire que c’est de sa faute, éprouver de la honte) et en venir à minimiser les abus qu’il-elle a subi ou tout simplement ne pas les reconnaître comme tels. Il–elle peut aussi craindre certaines réactions : être jugé-e, ne pas être cru-e, et ce, même si le parent est habituellement ouvert.
• Parler de ce qu’on a vécu, c’est aussi mettre des mots et reconnaître le fait qu’il s’agit d’un abus. Il peut toutefois être difficile et stigmatisant de s’étiqueter en tant que victime.
ALORS COMMENT ABORDER LA QUESTION SANS BRAQUER SON ENFANT ?
Si vous êtes inquiet–ète ou que votre intuition vous dit que quelque chose ne va pas avec votre jeune, vous pouvez :
🗣 Ouvrir la discussion en mentionnant vos inquiétudes : choisissez un moment approprié (seul à seul, moment calme) ;
👀 Lui dire factuellement ce que vous observez : « Je remarque que depuis quelques semaines, tu ne sors plus avec tes amis les fins de semaine » ;
🙌 Essayez le plus possible d’être patient–e. Il se peut que votre ado n’ait pas envie d’en parler à ce moment-là ou ne se sent pas prêt-e à le faire. Dites-lui alors que vous êtes disponible pour lui-elle et que votre porte sera toujours ouverte, puis réessayez à un autre moment ;
👩🏽🤝🧑🏿 Vous pouvez aussi dire à votre ado que s’il–elle n’a pas envie de vous parler mais que quelque chose ne va pas, il-elle peut en parler à une autre personne de confiance. À la fin de la journée, le plus important est que votre jeune en parle et qu’il-elle puisse être aidé-e.
Votre ado vous a rapporté avoir subi un abus sexuel ?
Malgré l’onde de choc de ces révélations, votre jeune a besoin d’avoir un parent sur lequel il-elle pourra s’appuyer. Il est essentiel que vous accompagniez votre enfant pour signaler la situation et trouver des ressources d’aide. Cette étape sera déterminante dans son processus de rétablissement.
Voici quelques informations pour vous aiderQUE FAIRE SI VOUS REPÉREZ DES COMPORTEMENTS PROBLÉMATIQUES AU SEIN DE LA RELATION AMOUREUSE DE VOTRE ADO ? 🚩 COMMENT LUI EN PARLER SANS LE-LA BRAQUER ?
La première chose à faire est d’ouvrir la discussion calmement. Commencez par nommer les faits que vous avez relevés puis exprimez à votre ado votre inquiétude :
• Adoptez une posture d’ouverture et d’échange : si votre discours est moralisateur ou empreint de jugement, votre ado risquerait de se braquer et de ne pas être réceptif-ve. Même si votre intention est de le-la protéger, évitez de lui dire qu’il-elle devrait mettre fin à la relation, car il-elle ne sera peut-être pas encore rendu-e là dans son cheminement et pourrait alors se refermer.
• Aidez votre jeune à prendre ses propres décisions en l’amenant à prendre conscience de comment il-elle se sent dans sa relation ou quand son ou sa partenaire a certains comportements. Vous pouvez aussi l’amener à réfléchir à des stratégies pour éviter que la violence se reproduise (p. ex., établir un plan de sécurité, réfléchir ensemble à de meilleures stratégies de gestion des conflits, verbaliser au partenaire que l’on n’accepte pas qu’il ou elle adopte des comportements violents).
👉 Si vous avez observé des comportements violents de la part de votre enfant avec sa-son partenaire ou ses amis, adoptez la même démarche en lui exprimant votre désaccord avec ses comportements. Amenez votre jeune à réfléchir aux impacts et aux conséquences de ses agissements : “Qu’est-ce que tu penses que ça va avoir comme impact que tu parles comme ça ou que t’aies ces comportements-là ?”.
Si cela persiste, n’hésitez pas à aller chercher de l’aide auprès d’organismes ou professionnels-les spécialisés.
Écoutez l'intégral de la webconférence sur la prévention des abus sexuels auprès des jeunes avec Roxanne Guyon
Écoutez notre balado !
Violence et vie amoureuse chez les ados : comment les mettre à l’abri ?
En association avec aidersonenfant.com, nous abordons dans ce podcast un sujet sensible : la violence dans les relations amoureuses de nos ados.
Comment, en tant que parent, peut-on mettre notre jeune à l’abri ? Comment en parler avec lui(elle) ? Où aller chercher de l’aide ?
Entrevue avec Andréanne Lapierre, doctorante en psychologie clinique à l’UQAM, spécialiste de la violence dans les relations amoureuses des jeunes et Samuel Cotnoir, intervenant à l’organisme CHOC, œuvrant auprès des hommes auteurs de violence conjugale.
Ressources externes
• On SEXplique ça service d’éducation à la sexualité
• Le livre On SEXplique ça ! : Comment parler de sexualité avec son ado de Annabelle Gauthier, Isabelle Arcoite et Laurence Desjardins
• Tous les services de la Fondation Marie-Vincent
• Le Guide à l’intention des parents réalisé par le Centre de Prévention et d’Intervention pour les Victimes d’Agression Sexuelle (CPIVAS)
• La plateforme Olie : pour tout savoir sur l’éducation à la sexualité des jeunes, véhiculée de façon ludique, interactive, personnalisée et validée par des professionnels de la santé sexuelle.
• Pour plus d’informations sur les aspects légaux du consentement sexuel, visitez le site d’Educaloi
Besoin de parler de ce que vous vivez avec votre ado?
Contactez Ligne Parents pour profiter d’un soutien professionnel gratuit 24/7